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Au service de la paix, « on est tous dans le même bateau ». Cette symbolique est forte pour Éric Sapin, responsable depuis 2003 de la « péniche pour la paix », un centre socio-culturel embarqué sur la Seine depuis maintenant trente ans. Car si ALTERNAT (telle qu’elle est baptisée) a eu un écho particulier au sein du parcours associatif d’Éric, elle n’est « pas une péniche pour nous tout seuls, mais à partager entre associations ». Le partage : tel semble être selon lui le maître-mot de l’action associative, le coeur des réflexions en cours et à venir sur une gestion des conflits à toutes les échelles.
« La coopération entre élèves, c’était déjà la vie »
Ses premiers souvenirs de démarche associative, Éric les doit à la MJC (Maison des Jeunes et de la Culture) du coin, au sein de laquelle il participait à divers ateliers culturels. Mais il lui doit aussi un grand regret : ce qu’il perçoit comme une absence de sensibilisation au projet associatif faisant des jeunes comme lui des « consommateurs » plus que des acteurs. Il en prend conscience bien plus tard, en même temps qu’il réalise la chance qu’il a eu de vivre la pédagogie coopérative de Célestin Freinet dans une classe unique, et le rôle qu’a joué son apprentissage du violoncelle.
De « spectateur du monde » à objecteur de conscience
La musique est en effet un élément décisif dans sa réflexion, lorsqu’à l’approche de son service militaire, il découvre le droit à l’objection de conscience lors d’une réunion de la Ligue des Droits de l’Homme. Il comprend qu’on peut agir pour la paix autrement que militairement, notamment par la musique et plus largement par les pratiques culturelles, à l’image de celui qui avait très tôt déjà suscité sa réflexion : Pablo Casals (violoncelliste engagé dans la lutte contre Franco). Entre « objecteur et chasseur alpin », il choisit le premier, mais conscient qu’il « ne suffit pas de faire des leçons de morale » car « il faut mettre en œuvre des solutions pour que les gens se parlent, tout ça s’organise »…
Le mouvement associatif, « acteur du développement la paix »
Éric rejoint donc ALTERNAT (qui connaît une période de difficulté) après avoir beaucoup réfléchi sur le lien très fort entre réseau associatif et lutte pour la paix. L’idée centrale est qu’en créant des conditions favorable à la vie en commun, on diminue les risques de conflit. La péniche s’oriente donc autour de ce modèle de centre social où le regroupement d’associations permet l’échange, l’insertion de personnes en difficulté, la formation, mais aussi le développement de pratiques culturelles. En parallèle, et au sein du Comité de coordination pour le service civil et le volontariat, Éric soutient le projet « Volontaires pour la paix » porteur du même esprit associatif orienté vers le développement de la paix. Mais il n’entend pas s’arrêter là dans sa réflexion autour de la gestion des conflits.
« Partout où nous sommes, nous vivons des cas de conscience »
Les « expériences morales », telles que celles qu’il a vécu en décidant d’être objecteur de conscience mais aussi en tant qu’acteur associatif, sont selon lui formatrices dans le parcours citoyen : elles invitent à se poser des questions et à les partager. Le problème complexe de l’autorisation du stationnement de la péniche par le port autonome de Paris l’a par exemple poussé à réfléchir sur le lien entre domaine public et action d’intérêt général. Plus récemment, ayant repris ses études au Collège coopératif de Paris, c’est vers une approche philosophique de la notion d’objection de conscience qu’il se dit « embarqué » : léger changement de cap peut-être, mais toujours dans le même bateau au service de la paix…
Clémence, pour Jets d’encre